I feel you - Chapitre 6 - Partie 2 [Lybertys]

Publié le par Lutraah/Lybertys

/!\ PARTIE 2

Et c’était vrai. Malgré le fait que je déteste les hôpitaux, et que je doive rester loin de sa chambre, je n’avais pas envie de m’éloigner de lui plus que je ne l’étais.

Nous restâmes un moment dehors. Caroline avait passé un bras autour de mon épaule, m’attirant contre elle, tout en s’appuyant légèrement sur moi. Lorsqu’elle eut trop froid, elle me proposa de retourner dans la salle d’attente. Je n’en avais aucune envie, mais je me levais en silence et la suivit. Elle faisait de petits pas, comme pour garder un équilibre déjà fragile. Nous nous installâmes côte à côte. Elle avait toujours besoin de ma présence tout près d’elle, comme si cela lui donnait l’impression d’être moins seule pour supportait ce qu’elle vivait : ce qu’il y avait de pire pour une mère. Un instant, je me demandais comment aurait réagit la mienne dans une situation semblable. Serait-elle restée à mon chevet, tout aurait-elle voulu fuir la situation dans l’alcool ? Je ne m’hasardais pas plus longtemps sur cette réflexion, connaissant parfaitement la réponse à cette question. Ma mère était telle qu’elle était, je ne la changerais pas et je l’aimais telle qu’elle était. Mais je n’avais jamais était confronté à d’autres mères, et me retenir de faire la comparaison avec la mienne. Ce que j’avais de plus en plus de mal à comprendre, c’était que Bastien y soit totalement aveugle.
Nous attendîmes encore une heure, dont chaque minute passant me semblait une éternité. Les personnes commençaient à s’accumulée dans la salle d’attente alors que toute la nuit avait été calme. Je supportais mal le brouhaha qu’ils créaient et l’agitation qui régnait dans les couloirs avec les brancards et les infirmières. Pourtant, un homme s’en dissocia. Il n’eut pas besoin d’approcher encore plus de nous et de dire un mot pour que je comprenne que cet homme allait nous apporter le verdict. C’était surement son regard  grave et anxieux posé  sur Caroline qui m’alerta. Il approcha de nous, et je fis un signe à la mère de Bastien pour la prévenir de sa présence.

Nous nous levions de concert avec Caroline.

 

-               Vous êtes bien Madame Lejeune?

 

Caroline ne pu qu’acquiescer, aucun mot ne sortant de sa bouche.

-               Dans ce cas veuillez me suivre dans le couloir, dit-il en constatant le monde dans la salle d’attente.

 

Au summum de l’angoisse, nous suivîmes cet homme. Son pas me semblait beaucoup trop lent. J’avais envie de l’arrêter pour qu’il abrège enfin ce suspens qui durait pour moi depuis des semaines. Je serrais les poings, tentant de me ressaisir et surtout de me maîtriser. Toute cette cérémonie pour nous donner enfin le diagnostique était interminable. Je savais qu’il allait mal, mais j’avais terriblement peur d’en deviner la gravité. Le médecin nous guida jusqu’à un couloir plus tranquille où le va et vient des personnes était presque inexistant, nous permettant le calme pour qu’il parle enfin. Caroline, pâle comme un cachet d’aspirine, semblait avoir de plus en plus de mal pour tenir sur ses deux jambes, et je restais près d’elle au cas où…

 

-               Bon… Commença enfin à dire le médecin, après avoir effectués plusieurs tests de mémoire à votre fils qui se sont révélés intriguant, nous lui avons fait passé un scanner et…

-               Venez-en aux faits, le coupa Caroline.

 

Le médecin pâlit, prenant soudain un air plus grave. J’avais l’impression que mon cœur battait beaucoup plus fort sous l’impatience qu’il provoquait chez moi. Il semblait avoir quelque chose à lui apprendre de très difficile, surtout à une mère au sujet de son jeune fils. Je me refusais à penser au plus funeste des diagnostiques. Pourtant, ce qu’avait Bastien était loin d’être mineur, mais je priais pour que ce ne soit pas l’extrême opposé.

 

-               Madame, commença le médecin d’une voix professionnelle, votre fils a une tumeur.

 

Je n’eus pas le temps de me préoccuper de ma propre réaction, je vis Caroline vaciller et la rattrapais de justesse. S’appuyant lourdement sur moi, le médecin lui laissa un temps pour digérer l’information, avant de préciser.

-               Rassurez-vous, elle est bénigne. C’est une tumeur frontale mais elle est énorme. C’est étrange qu’il ait tenu le coup jusque là. Votre fils ne simulait pas sa douleur.

-               Qu’a… Qu’allez vous lui faire, articula difficilement la mère de Bastien. Vous allez pouvoir le soigner docteur ?

-               Nous devons l’opérer assez rapidement, je devrais pouvoir programmer l’opération pour après demain.

 

Caroline restait figé, fixant le médecin, tendit que j’avais du mal à entendre la suite de la conversation, j’avais l’impression que mes oreilles bourdonnaient. Pourtant j’entendis soudain une autre voix :

 

-               Caroline ! Dit assez fort le père de Bastien, François, qui arrivait juste derrière nous, essoufflé par sa course jusqu’ici.

 

Caroline se tourna vivement, se jetant dans les bras de son mari, qui la serra, hébété par son attitude.

-               François, Bastien va se faire opérer, il… Il a une tumeur au cerveau.

Gardant Caroline dans ses bras, François porta toute son attention sur le médecin, trahissant très aisément que la nouvelle le bouleversait. Il n’eut pas besoin de lui demander de plus amples explications, le médecin lui expliqua plus en détail ce que Bastien avait.  Une fois qu’il fut au courant de tout dans tous les détails, il demanda au médecin en s’énervant légèrement, s’il ne pouvait pas avancer l’opération. Le médecin répondit à la négative, et finit par leur demandais s’il se chargeait d’en parler à Bastien ou s’ils préféraient le faire. Ils répondirent de concert qu’ils allaient s’en chargé, et le médecin fini par les laisser seul, Durant toute cette scène, j’étais resté en retrait, étranger à cette famille qui n’était pas la mienne. Pourtant mon cœur battait pour Bastien et son futur incertain. Appuyé contre le mur, j’avais du mal à digérer l’information. François s’était mis à pleurer, tenant toujours sa femme dans les bras. Ils étaient seuls dans le couloir, et moi uniquement spectateur.  Ce n’est qu’après un long moment qu’ils se calmèrent, se décidant la mort dans l’âme à se diriger dans la chambre de Bastien pour lui annoncer le verdict. Son père m’invita à les suivre, et d’un pas pesant nous nous rendîmes dans la chambre ou ma présence n’était pas souhaitée. Cette fois-ci, je restais vers la porte, dans l’angle près du mur, m’approchant surtout pas trop de lui. Je ne voulais pas qu’il se sente envahi de ma présence. De plus cet instant ne m’appartenait pas, j’avais cette cruelle impression d’être intrus. Caroline et François se plaçaient d’un côté de l’autre du lit. Bastien m’apparaissait comme encore plus mal, alors que son état ne variait en rien d’hier soir. Le fait d’avoir mit le mot tumeur sur son état, le rendait encore plus grave.

Prenant une profonde inspiration, ce fut sa mère qui la première commença à parler :

 

-               Nous venons de discuter avec le médecin, qui nous parler du résultat des examens.

Tentant de passer sa main dans les cheveux de son fils, avec la tendresse qui caractérise une mère, elle se heurta à un refus, Bastien tourna légèrement la tête, l’évitant. Il attendait que sa mère poursuive, ce qu’elle fit en cachant au mieux sa peine.

-               Il nous a dit que… Enfin, tu souffres de… Tu as une… Dit Caroline, apparemment incapable de prononcer le mot « tumeur ».
-               Qu’est ce que j’ai ? Dit Bastien agacé par cette dose d’angoisse supplémentaire.

 

Ce fut son père qui intervint. Posant une main sur son épaule que Bastien ne repoussa pas, il lui annonça d’une voix grave et paternelle de quoi il souffrait. Bastien écouta sans sourciller, semblant encore moins bien réaliser que nous tous dans cette pièce. Il semblait totalement perdu, et heureusement, son père craqua et le prit dans ses bras… Bastien se laissa faire, sans pour autant se mettre à pleurer, ce qui aurait été tout à fait normal. Caroline les regardait tous les deux, et me sentant cette fois-ci vraiment de trop, je sortis de la chambre sans un bruit, espérant qu’ils n’y prêteraient pas attention. J’allais directement dehors, et jetais rageusement mon paquet de cigarette vide. Une de plus ne m’aurait pas fait de mal. J’avais besoin de faire autre chose, de me sortir de cette ambiance d’hôpital et de tout ce que Bastien était en train de vivre. J’y étais profondément impliqué tout en ne trouvant pas ma place. Je m’inquiétais pour Bastien, et je ne savais plus quoi faire pour évacuer tout ce que je ressentais. Alors que je m’asseyais sur un banc, un jeune homme d’environ cinq années de plus que moi se planta devant moi, me demandant en me tendant son paquet :

-               Une cigarette ?
-               Oui, je veux bien, merci. Répondis-je avec un sourire forcé.
-               Je m’appelle Jérémie et toi ?

-               Morgan, répondis-je simplement, pour une des rares fois ou j’avais très peu envie de parler à un bel homme.

Mais je savais que sa cigarette avait un prix… Alors que j’allumais la cigarette qu’il m’avait donné, il vint s’asseoir à côté de moi, lâchant un soupire.

 

-               Mon ami a eu un accident. Heureusement, ce n’est rien de grave. Il va pouvoir sortir dans une heure. Et toi ? Qu’est ce qui t’amène ici ? Me demanda-t-il sans la moindre pudeur.

-               Rien qui ne vous concerne, répondis-je, mettant des limites.

-               Très bien, désolé, je ne sais pas rester à ma place, tu m’as donné l’impression en sortant d’avoir besoin de parler, tu avais l’air assez mal.

-               Oui, je le suis en effet, dis-je, me tournant cette fois-ci sérieusement vers lui.


Je n’avais pas fait attention au regard qu’il avait posé sur moi, me faisant clairement comprendre que toutes ses questions et ses attentions n’avaient qu’un seul but. Il était assez grand, peut être un peu plus que moi, des cheveux bruns légèrement ondulé et assez courts. Beau corps, même si installé ainsi, il ne me permettait pas de le voir avec précisions. Mon regard revint sur ses yeux marron foncés, avec une légère touche de vert, qui le rendait intriguant. Je ne pouvais y être insensible.

-             Tu sais, je connais un moyen d’aller mieux, dit-il en se rapprochant sensiblement de moi et posant sa main sur mon genoux.

Certains auraient pu être choqué par ce rentre dedans, mais c’était loin d’être mon cas. Ce qu’il me proposait était mille fois mieux qu’une cigarette. Depuis combien de temps n’avais-je rien fait, me contentant de veiller sur Bastien chaque nuit. Sa main maintenant posé sur mon genoux, remonta sensiblement jusqu’à ma cuisse avec envie. Je la rattrapais, avant qu’elle n’aille trop loin, et me levais, tenant toujours sa main en l’incitant à faire de même.


-               Je connais un endroit tranquille pas très loin, me proposa-t-il, semblant comprendre que je lui cédais.

 

Cependant, il avait du mal à cacher sa surprise. Peu d’adolescent de mon âge devait accepter aussi facilement. Mais après tout, quel mal y avait-il à prendre un peu de plaisir ? Il partit devant et je le suivis sans un mot…

***

 

Je m’étais réveillé assez tard, ce matin là, après la nuit blanche que nous avions passé à l’hôpital. La mère de Bastien avait passé la journée avec lui, tandis que le père avait gardé les petits. Ils restaient ainsi aux côtés de Bastien à tour de rôle. Caroline n’allait pas tarder à rentrer, alors que j’étais en train de bouquiner dans le salon. Je n’avais envie de rien, et le livre restait ouvert sur mes genoux la plupart du temps sans que je ne tourne les pages. Je finis par me lever et allais aider le père de Bastien à préparer le repas. Il ne parlait presque pas, et je n’en avais pas la moindre envie non plus. Le silence était uniquement ponctué par le rire des deux enfants qui jouaient assis à la table de la cuisine avec de quoi dessiner.

La porte d’entrée ne tarda pas à  s’ouvrir, et nous entendîmes la voie de Caroline et de deux autres personnes. Le père me lança un regard intrigué. Il laissa tout ce qu’il était en train de faire, et prit la direction du couloir d’entrée. Curieux, je le suivis.

-               Je suis sincèrement désolé Madame, mais heureusement, nous venons de leur trouvé une autre famille et je pense que vous alléger de ces enfants est nécessaire. Vous ne pouvez pas continué ainsi avec votre enfant malade. Déclara une femme assez petite et pincée.

 

Mon cœur s’emballa, partir d’ici ? Il n’en était pas question. Je voulais suivre l’état de Bastien, je voulais rester ici, près de lui…

 

-               Quand partent-ils demanda Caroline, d’une voix dangereusement faible.

-               Maintenant, nous avons encore le temps. Les parents qui désirent les adopter définitivement sont prêts à les accueillir.

François et moi arrivâmes devant eux. Se plaçant très vite comme soutient auprès de sa femme, il demanda vivement :

-               Que se passe-t-il ?

 

Patiemment, une des deux femmes expliqua au père de Bastien qu’ils venaient de trouver une famille pour les deux petits, sans aborder tout de suite mon cas. Ils partiraient dès ce soir, le temps que Caroline fasse leur valise. Celle-ci se tenait à François, tentant de ne pas tomber pour de bon. C’était trop pour ses épaules, trop d’un coup pour elle. L’autre femme approfondis les explications, mais les deux parents avaient très bien compris que tout cela n’était que la cause de la maladie de leur unique enfant. Posant soudain son regard sur moi, une des deux femmes dit au père en continuant à me regarder :

 

-               Pour ce qui est de son cas, peut-on aller nous asseoir quelques minutes.

Le père acquiesça et nous prîmes tous place dans le salon. Prenant une inspiration, une des deux assistantes sociales commença à prendre la parole :

-               Comme vous le savez, Morgan sera majeur dans 4 mois. Lui trouver une autre famille d’accueil provisoire avant sa majorité tient du miracle, mais il peut toujours être placé en centre pour attendre. C’est pourquoi je me tourne d’abord vers toi Morgan, dit-elle, me faisant face. Désires-tu rester ici, ou bien partir dans un centre pour les quelques mois qui te restent ?

 

Je sentis le regard des parents posés sur moi, mais je n’eus pas besoin d’eux pour connaître ma réponse. Je savais ce que je voulais. C’est pourquoi, sans la moindre hésitation, je déclarais :

-               Je préfère rester ici…

Ma phrase prononcée avec une telle détermination, fit presque sursauter Caroline. Je ne savais même pas s’ils désiraient ma présence, mais égoïstement, ce n’étaient pas eux qui m’importaient. Les deux femmes me regardèrent sceptique avant de me demander de nouveau :

-               Tu en es sur ?

-               Oui, affirmais-je.
-               Bien, si tu veux bien nous laisser seuls maintenant, nous aimerions nous entretenir avec Caroline et François.

Acquiesçant, je me levais et me rendis directement dans la chambre de Bastien que je partageais avec lui. Je devais avouer que la présence de celui-ci me manquait. Je m’y étais habitué, même s’il n’était pas forcément très sociable. J’avais été souvent seul la plupart du temps et n’avait jamais souffert de la solitude comme ce soir là. Mais la personne qui me manquait le plus était ma petite sœur, dont je n’avais aucune nouvelle depuis trop longtemps. Aurais-je seulement le droit de la voir dans quatre mois à ma majorité ? Et que devenais ma mère…
M’asseyant sur mon lit, adossé au mur, j’attrapais un magasin que j’avais déjà feuilleté des centaines de fois, laissant défiler les pages, sans même les regarder. Ce ne fut qu’après une bonne demi-heure que les assistantes sociales vinrent me voir, me prévenant que je restais ici et qu’elles allaient partir avec les deux petits. Je me levais pour les rejoindre en bas, ayant tout de même envie de leur dire au revoir. La petite me sera fort dans ses  bras, s’étant attaché à moi plus que je ne le pensais. Quand pourrais-je prendre ma petite sœur ainsi de nouveau ?
Caroline était dévastée et je savais qu’il suffisait qu’ils s’en aillent pour qu’elle s’effondre. Demain son fils se faisait opéré et elle perdait une partie de sa famille. Les adieux durent très dur pour elle comme pour François, et lorsque la voiture démarra, je restais un peu dehors, prétextant l’envie de fumer une cigarette, mais désirant surtout leur laisser un moment d’intimité avant que François n’aille rejoindre Bastien. M’asseyant sur les marches, je regardais la balançoire et les quelques jeux qui étaient dans le jardin. Ils n’avaient maintenant plus aucune utilité. Lâchant un soupire, je finis par me lever, rentrant dans la maison, ignorant Caroline et François dans le salon, allant directement dans la chambre.
J’y passais presque toute la soirée, Caroline restant dans son coin et moi dans le mien. L’envie de sortir n’était pas là, et je décidais simplement de me coucher tôt, ignorant les pleurs de Caroline que je pouvais entendre. Je ne pouvais rien pour elle et toute cette souffrance était trop dur à supporter et bien trop lourde. La solitude était finalement préférable. Qu’aurais pu lui dire ou faire de toute façon ?
Je mis beaucoup de temps à m’endormir, les yeux grand ouverts, fixant le plafond, avant de les fermer et de m’endormir sans en avoir conscience…

 

Le lendemain matin, je fus réveillé par Caroline assez tôt, qui m’appeler de la porte.

-               Morgan, réveille toi, il faut que tu ailles en cours aujourd’hui, tu as assez manqué le lycée.

Me redressant d’un bon, je me rappelais que c’était aujourd’hui que Bastien se faisait opéré. Caroline était déjà en train de descendre les escaliers, ne me laissant pas le choix. Je savais qu’entamer cette discussion avec elle était inutile, je devrais subir une journée de cours avant de me ruer à l’hôpital pour savoir ce qu’il en était. Je n’avais pas vu Bastien hier, et je savais qu’il ne souhaitait toujours pas ma présence. Je n’osais même pas imaginer son état. Passant à la salle de bain, je ressortis propre et fraîchement habillé. Descendant à la cuisine, je m’arrêtais avant de rentrer, entendant une discussion au sujet de Bastien entre son père et sa mère qui je le pressentais prendrait fin lorsque je rentrerais.

                                                                                                                                              

-               Je te préviens Caroline, Bastien vit très mal le fait qu’on ait du lui raser la tête, et c’est à peine s’il m’a adressé un mot ce matin lorsque je suis partis. Il va de plus en plus mal moralement et je ne vois pas quoi faire pour l’aider… Je viens aujourd’hui avec toi, l’opération commence à 14h00. Morgan va…
-               Il va au lycée, le coupa Caroline.
-               Oui, il vaut mieux pour lui qu’il soit occupé, et qu’il ne traîne pas ici ou à l’hôpital. Il a déjà loupé assez de cours, répondis François.

N’ayant pas envie d’en entendre plus à mon sujet, et pestant contre le peu de nouvelle que j’avais de Bastien de part cette courte discussion, je rentrais dans la cuisine, dans un silence de plomb.

-               Bonjour Morgan.
-               Bonjour, répondis-je simplement, en m’asseyant à table après avoir pris le nécessaire pour petit déjeuner.
-               Je vais prendre une douche, dit François à notre attention.


Nous laissant seul, Caroline vint s’asseoir en face de moi, me faisant clairement comprendre qu’elle avait à me parler. Buvant une gorgée de jus d’orange, je la regardais, lui montrant que j’étais réceptif à ce qu’elle allait me dire.

-               Les petits n’étant plus là, j’aimerais que tu prennes leur chambre. Cela ne sert plus à rien que tu partages ta chambre avec Bastien. Je… J’aimerais te demander quelque chose Morgan.


La regardant je savais parfaitement quel sujet délicat elle voulait aborder, et choisir ce jour était comme m’interdire de l’ouvrir au vu des circonstances. Je n’étais pas du tout d’accord avec elle au sujet de la soit disant homosexualité de son fils.

 

-               J’aimerais que tu laisse Bastien tranquille et que tu ne cherches pas à le rendre comme toi, il a déjà assez de… problèmes.
-               Le rendre comme moi ? Demandais-je, feignant l’innocence

-               Il vaut mieux que le regard de Bastien se porte sur les filles. Dit-elle assez gêné, mais ferme et déterminée. L’homosexualité n’est pas faite pour lui.

-               Ah, c’est pour ça que tu me changes de chambre, par peur que je ne touche à Bastien ! M’exclamais-je, ne cachant pas ma colère.

-               Oui, me répondis froidement sa mère, se moquant de ma réaction.


Me levant d’un coup, préférant ne pas aller plus loin dans ce genre de conversation, seulement au vu des circonstances, je ne pus me retenir de dire en quittant la cuisine :

-               Me changer de chambre ne me limite en rien si je voulais vraiment de lui. Et puis Bastien est assez grand pour faire son choix à ce sujet là…

Je sentis soudain la main de Caroline m’attrapais brusquement, me forçant à me retourner. Son instinct de mère protégeant son fils parlait pour elle.

 

-               Je vais être plus clair, je ne te le demande pas, je te l’interdit. Ne touche pas à Bastien.

 

Me dégageant vivement d’elle, je déclarais avant de monter chercher mon sac :

-               Qui t’as dit qu’il m’intéressait !

 

Montant les marches quatre à quatre, j’attrapais mon sac posé sur le sol, y fourrant de quoi écrire et prenant mes quelques livres. Mettant mes chaussures, il me fallut peu de temps pour attraper ma veste et prendre la direction de la sortie. Caroline ne m’arrêta, et cinq minutes plus tard, je me retrouvais à marché vivement, une cigarette à la main, en direction du lycée. Je sentais que la journée allait être longue et je n’attendais qu’une chose, que les cours qui n’avaient même pas encore commencé finissent pour que je puisse enfin aller voir Bastien. Caroline allait-elle aussi m’interdire cela ? Je soupirais en tapant sur un caillou qui traînait sur mon chemin. A quelle heure allait-il être opéré, nous n’avions même pas parlé de cela ce matin…

 

-               Morgan ! Cria soudaine une voix derrière moi.

Me retournant, je pus voir Aurore. Elle tombait mal, c’était vraiment la dernière personne que j’avais envie de voir. Profitant de son effet de surprise, elle sauta sur moi me faisant une bise de force.

 

-               Alors ça fait un moment qu’on ne t’a pas vu ! Qu’est ce qui t’es arrivé ?

Bien évidemment Bastien ne l’intéressait pas le moins du monde. N’ayant aucune envie de parler avec elle, je répondis assez brièvement :

-               Rien qui ne te concerne Aurore.

La laissant sur place en lui tournant le dos, je pris la direction du bureau des surveillants pour faire signer mon absence. Etonnamment, elle me laissa en paix.


La journée fut assez longue, je choisis de rester dans mon coin, angoissant seul pour Bastien. Aurore ne me lâcha pas d’une semelle à la pose de midi, ne comprenant pas que je n’avais pas la patience nécessaire pour la supporter. Aucun professeur ne me demanda la raison de l’absence de Bastien. Soit ils étaient déjà au courant, soit ils s’en moquaient ouvertement. Si personne ne remarquait qu’il n’était pas là, ce n’était pas mon cas. Après l’avoir surveillé pendant deux semaines, cette fois-ci je m’ennuyais. Les cours passaient à une lenteur insurmontable et la chaise occupée par Aurore à mes côtés ne m’aidait pas. Il n’y eu pas un seul instant ou je ne m’inquiétais pas au sujet de Bastien. Était-il sur la table d’opération à ce moment là ? Etait-est-ce fini ? Ou bien angoissait-il à l’idée de se faire ouvrir le crâne… Je n’osais même pas imaginer son état, mais je savais que ma place était ici et non à ses côtés. Il me restait encore un cours d’une heure après celui-ci, un cours de langue, les seules ou Bastien montrait son intérêt.
L’intercours arriva plus vite que je ne l’aurais pensé. Nous restions dans la même salle, mais plusieurs en profitèrent pour sortir et s’aérer un peu. Nous avions une pause, et j’avais le temps d’aller me fumer une cigarette. Dans un peu plus d’une heure, je pourrais enfin me rendre à l’hôpital. Rien qu’à cette idée, je sentis les battements de mon cœur s’accélérer. Retournant en classe discrètement, je retournais à ma table du fond, ou les affaires d’Aurore étaient toujours posées. Elle n’avait pas décidé de changé de place. M’asseyant, je vis qu’elle était la seule à ne pas être revenu en cours. Les autres parlaient dans leur coin, chacun en petit groupe. Était-ce ça que Bastien voyait tous les jours ? La vie des autres défilé devant lui sans qu’il n’y trouve sa place ?
C’est à ce moment là que Aurore arriva, passant la porte avec un grand sourire aux lèvres et s’exclamant à haute voix :

-               Et vous savez quoi !

La plupart tournèrent la tête vers elle alors qu’elle se mettait à rire d’un air moqueur.

-               Ce naze de Bastien a une tumeur au cerveau et il se fait opérer aujourd’hui !

La haine s’infiltra dans me veine lorsque je vis la réaction des autres. Alors que certains riaient avec elle, d’autres s’en foutaient totalement, retournant à leur occupation. J’étais donc le seul dans cette pièce à m’inquiéter réellement pour sa vie. Attrapant mon sac, je me levais, ne voyant plus aucun intérêt à rester avec eux. Arrivé à la hauteur d’Aurore qui était devant la salle de classe, je la tirais brusquement dehors. Ne mâchant pas mes mots, je la plaquais contre le mur, en étant ferme mais non violent. Pour la première fois croyait-elle certainement, elle voyait mon vrai visage.

 

-               Tu sais comment on appelle les personnes comme toi ! Commençais-je. Ca te fait rire c’est ça le pire. Tu es cruelle, alors qu’il peut mourir à tout moment.

Je n’allais pas trahir les sentiments de Bastien à son égard, mais l’idée même qu’il croit l’aimer me rendait fou. Je n’avais jamais supporté l’attitude immature et sans cœur de ceux de cette classe comme la plupart de ceux que j’avais pu connaître. Je n’avais vraiment plus rien à faire ici.

 

-               A l’avenir ne m’adresse même plus la parole, ça n’en vaut pas la peine.

Lui tournant le dos, je pris le chemin le plus court pour sortir de cet établissement où j’étouffais. La peur que Bastien ne s’en sorte pas m’envahissais si brusquement, que je sentais les larmes monter, et ma gorge se noua pour les retenir. L’idée même qu’il quitte cette terre maintenant alors qu’il n’avait rien connu et que la vie ne lui avait rien donné me comprima le cœur. Je me fis la promesse que s’il s’en sortait, je l’aiderais à découvrir ce que la vivre était réellement. Je voulais le soutenir, l’aider à aller plus loin que ce que les autres prévoient pour lui, qu’il se laisse enfin aller à être lui-même. Il ne pouvait pas continuer ainsi, si sa tumeur ne venait pas à bout de lui, c’était ce qu’il s’imposait qui allait le tuer. S’était-il seulement senti tout simplement bien et libre un jour ?
Le bus arrivé, et j’écraser ma cigarette avant de monter dedans. S’il ne prenait pas de retard, dans un peu moins de vingt minutes, je serais à l’hôpital. J’avais tant de chose à lui dire et à lui faire comprendre. Je savais que cela serait difficile, et qu’il n’allait pas accepter mon initiative à bras ouverts, mais je ne lui laisserais pas le choix.
Lorsque le bus s’arrêta, j’étais déjà debout vers la porte, prêt à descendre. C’est en courant que je fis le trajet jusqu’à l’hôpital. Je ne ralentis que lorsque je passais l’accueil. Je connaissais  la localisation de la chambre de Bastien et je m’y rendis directement. Mon cœur faillit louper un battement en la découvrant vide. Je priais intérieurement pour qu’il soit encore sur la table d’opération. Me dirigeant d’un pas vif, je tentais de garder mon calme du mieux que je pouvais, mais mes mains tremblaient déjà sans que je puisse les contrôler. Arrivé à la salle d’attendre, je repérais tout de suite la mère de Bastien dans les bras de son mari en larmes. Les yeux rougis de François me montraient qu’elle n’était pas la seule à pleurer. Mes jambes faillirent flancher, en m’imaginant le pire. Ce ne fut que lorsque je m’arrêtais devant eux que Caroline redressa la tête s’apercevant de ma présence.  Je n’avais pas envie d’entendre, pourtant je ne pus m’empêcher de commencer à demander :

-               Qu’est ce que…

Ce fut François qui prit la parole, Caroline en était incapable. Je ne la comprenais que trop bien, comment dire à voix haute que son fils n’était plus de ce monde. J’avais envie de hurler, ne sachant plus trop où j’en étais. Ma vue commençaient à se brouiller, ma poitrine se comprimait si fort que j’avais l’impression que mon cœur se battait héroïquement pour chaque battement. Ca ne pouvait pas se terminer comme ça !

-               Il y a eu des complications, commença François.

Désirait-il m’achever à parler si lentement. Qu’il en vienne au but, qu’il n’annonce enfin le verdict.

 

-               Il est encore sur la table d’opération… Ils ne peuvent pas nous en dire plus.

Un espoir, si minime soit-il, fit battre mon cœur légèrement plus vite. Plus pâle que jamais, François se leva soudain, et m’attrapa vivement, me prenant dans ses bras. S’était-il rendu compte que  mes jambes n’allaient plus me tenir une seconde de plus. Craquant, je ne pus retenir mes larmes, suppliant intérieurement de toutes mes forces qu’il s’en sorte et qu’il ne nous abandonne pas…

 

 

 A SUIVRE 

Publié dans I feel you

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J
<br /> J'ai enfin tout lu ! j'aime beaucoup cette histoire, comme les autres, j'ai vraiment hate de lire la suite, un peu avant la fin du chapitre j'avais presque arrêté de respirer coryant que Bastien<br /> était mort, j'ai vraiment eu peur ! en tout cas bravo en tout ces trois hitoires sont vraiment réussies ^^<br /> <br /> <br /> bon courage !<br />
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A
<br /> <br /> Un petit mot pour demander si vous continuez vos histoires ou pas :/ ? Je commence à perdre histoire... J'adore "I feel you", et j'espère sérieusement de tout coeur qu'elle soit terminée...<br /> Please, une réponse si possible TT.<br /> <br /> <br /> <br />
Répondre
A
<br /> <br /> De retour, après avoir relu cette histoire pour au moins la troisième fois. <br /> <br /> <br /> Et encore, elle est fantastique, comme d'habitude! <br /> <br /> <br /> Est-ce qu'il va y avoir la suite? <br /> <br /> <br /> <br />
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H
<br /> <br /> C'est fou, ca doit bien faire (presque u.u) 1 an que je suis venue lire ce chap et je me souviens de toute l'histoire (c'est rare croyez moi x'D)..... seulement ca fait un long (très même) moment<br /> que y'a pas de new, est-ce que le blog et l'histoire ont été abandonné? J'espère vraiment pas puisque je suis toujours aussi a fond dans votre histoire et que ce serait dommage d'abandonner une<br /> si bonne histoire!!<br /> <br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Hello! Ça serit bien de savoir si la suite sera posté. Et aussi pour les histoires de l'autre blog de Lybertis?<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Au fait, fabuleuse histoire! ^^<br /> <br /> <br /> <br />
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